Une semaine à Dumila [3] : Aperçu de la vie locale tanzanienne

"Hakuna Matata" (Pas de problème)

 

          Le mantra incontournable de la culture bantou swahilie, et une expression très récurrente chez Said en particulier. Il n'est pas très à l'aise avec son anglais, et le charabia des néo-zélandais n'aidait pas. Je l'ai rassuré en lui expliquant qu'en général, moi non plus ne comprenais pas les trois quarts de ce qu'ils bitaient. Lui en revanche est très facile à comprendre. Il a commencé à héberger des volontaires il y a trois ans, quand j'ai moi-même commencé à voyager grâce à Workaway (ce qui fait de Dumila mon 15e volontariat). Pour info, Simba veut dire lion et Pumba phacochère en swahili.

Le meilleur conseil que je pourrais donner pour s'intégrer dans cet environnement : oubliez que vous êtes un Muzungu (blanc). Arrêtez de calculer les regards étonnés, le fait est que vous serez observé en permanence quand vous marcherez dans une ville de la sorte. Malgré l'abondance récente de volontaires, beaucoup d'enfants d'ici n'ont jamais vu de blanc de leur vie.

"On vit sans rien planifier"

 

          Comme Said aimait bien le répéter. Autrement dit, on mange quand on a faim. Si je savais toujours exactement ce que j'allais manger, je ne savais jamais quand. Les repas sont simples et on les mange à la main. L'ugali, sorte de polenta à base de maïs constitue l'essentiel de l’alimentation. Il est agrémenté d'haricots, d'épinards et parfois de quelques morceaux de bœuf (pas de premier choix) dans une sauce à base d'oignons, de tomates et de poivrons. Pas mauvais du tout.
Le petit déjeuner du dernier jour était des abats de vache : les genoux, dans leur bouillon de graisse. Ce fut sûrement l'une des pires épreuves culinaires de mon existence. Je n'ai pas pu en venir à bout. "Asente Kwachakura Kisuri" qu'on pourrait traduire par "Merci pour ce délicieux repas", était ma formule magique après chaque repas (sauf pour ce dernier).

On peut jouer avec n'importe quoi et avec n'importe qui, mais surtout avec une balle de foot

 

          En rentrant d'une partie de foot sur le terrain de l'école vers 17h, les filles ont montré l'heure et se réjouissaient de la punition que les garçons allaient recevoir. Elles disaient "Stick" en mimant des coups de bâton. Fou rire général. Je pense que j'ai ai fait un peu trop, et que les garçons, vu leur réaction, ont cru que j'allais les punir moi-même.

Les filles aussi adorent jouer au foot, mais elles n'ont pas le droit de jouer avec le sexe opposé. Heureusement que j'avais ramené deux balles. Les voir jouer de toutes les fibres de leur corps fait vraiment plaisir. Mais les plus enjoués sont certainement les plus petits, même s'ils se prennent des claques de la part de leurs aînés chaque fois qu'ils interviennent. Sous la pression des grands, rien à faire pour essayer de les intégrer. Cela ne les empêchaient pas de se ruer, de se bousculer, voire de se plaquer entre eux pour être les premier à récupérer la balle lorsqu'elle sortait. A peine assez grand pour marcher, mais suffisamment pour shooter dans un ballon.

          Parfois, nous allions jouer sur le grand terrain de l'école. Nous démarrions des séances de tir au but à cinq. Au bout de dix minutes, nous étions au moins trente (sans compter l'armée de tout petits sur le bord du terrain qui mettaient une pagaille pas possible quand l'envie leur prenait de se mêler à la confrontation). Etant le seul en chaussures, je restais au goal, arbitrais, encourageais et félicitais. Même ceux qui se prenaient des buts voulaient me taper dans les mains. Mais les matchs devenaient vite hors de contrôle et ne duraient jamais longtemps. 

 

A une semaine de l'ouverture de la Coupe d'Afrique des nations, la Tanzanie affrontait amicalement la Zambie. Nous voulions voir le match dans un pub et étions tous un peu déçus que le match ne soit pas retransmis. Pour 2000 shillings (environ 1€), on peut choisir entre trois bières : la Safari, la Kilimanjaro ou la Serengeti (nom du Parc National le plus important). Les néo zélandais, qui y sont retournés plusieurs fois ont assisté en direct à la chute d'un nouvel écran sur le sol... Pauvre tenancier !

Tous les soirs ou presque, Sandor regardait sur la petite télé des matchs de Ligue 1 commentés en arabe sur Bein Sports. J'ai également pu regarder le match France - Andorre. En parallèle, avec Donaldi, Samweli et quelques autres enfants, nous faisions des parties de Uno local avec mon jeu de cartes, ou "Karata" comme ils disent. 

"Nobody is perfect for everybody, but for me you were perfect"

 

Je voulais finir sur ces mots, car Said répétait souvent que "personne n'est parfait". En cause, j'avais l'impression qu'il se sentait coupable de nous faire payer pour la nourriture (5$ par jour), et du confort précaire qu'il avait à nous offrir. Mais c'est aussi cela l'échange culturel : goûter au mode de vie local sans aucun traitement de faveur.

A l'heure où j'écris ces lignes, la Tanzanie affronte le Kenya. Pour l'instant, Viva Tanzania ! Mais je me prépare à retourner ma veste, car je serais peut-être au Kenya au moment de leur mise en ligne.

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