25/02 - 03-03 - Arrivée à Caijiagou chez Yang Yang : un hôte prudent mais vaillant - Volontariat dans la campagne chinoise [1]

CAIJIAGOU, REGION DE CHONGQING, CHINE
25/02 - 03-03

Dès la station du bus de Sigongli à Chongqing commençaient les inconvenances attendues de la barrière de la langue. Heureusement, l'itinéraire de Yang était très détaillé. Il m'avait envoyé le nom chinois de toutes les villes et stations de bus à prendre, que je n'avais plus qu'à pointer du doigt sur mon téléphone (en cas de blocage de mon interlocuteur). A part mon ventre qui me lançait de façon répétée, je me sentais bien. J'avais sauté le petit déjeuner et le déjeuner, mais c'était pour le mieux.

Caijiagou
Caijiagou
Dans le bus pour Nanchuan, j'étais assis à côté d'une jeune chinoise qui devait se rendre dans une ville pas loin de ma destination. Elle m'a épargné la galère du bus local, où le chauffeur n'avait pas le temps de s'occuper d'un étranger désorienté. Elle m'a aussi épargné la difficulté d'expliquer à l'autre chauffeur (malgré mes phrases toutes faites en chinois), qu'il fallait me déposer devant un pont, à l'entrée d'un village que personne ne connaissait. J'avais des photos au cas-où, mais le chauffeur s'est bien débrouillé. La route passait entre les montagnes et les forêts.

Yang House
Maison de Yang, ancienne ferme
Caijiagou, petit village d'environ 200 habitants, dans les "Golden Buddha Mountains", sera ma demeure pour la semaine. Après un peu plus d'un kilomètre à pieds, je suis arrivé en fin de journée dans la petite "ferme" de mon hôte : Yang Yang (caractères chinois différents).

Yang Hall
Salon

Il m'a accueilli avec un dîner et des formalités, avant de me présenter son humble demeure. On est loin du taudis annoncé. Le salon est presque classe dans un sens.

Living room Yang
Ma "chambre"
J'ai pu choisi ma chambre, la moins sale et poussiéreuse. Les toilettes compost de fortune sont potables. Il suffit de mettre une lunette sur un sceau, et on évite tous les désagréments des toilettes turques ou à l'indienne.

Yang trek
Pause pendant une randonnée
Le personnage est véritablement surprenant. Du haut de ses 45 ans, Yang est grand (pour un chinois) et maigre, les joues creusé et le crâne dégarni, et toujours vêtu d'un chemisier en filigrane sous son blouson vert. D'une voix fluette, il parle un anglais excellent, hérité de ses nombreuses expériences de voyage, comme volontaire, couch surfer ou travailleur. Célibataire endurci au sourire facile n'est pas le seul contraste de cet homme. Pour quelqu'un qui a autant voyagé, il est d'une prudence incroyable.

Moi trek Yang
Autre type de pose
Problèmes de santé oblige, il s'est organisé un mode de vie très strict, aussi bien dans l'organisation des tâches que dans son régime alimentaire. Ce qui ne l'empêche pas d'être flexible. Je pouvais manger tout ce que je voulais (dans la limite du disponible), et du moment que je travaillais au moins quatre heures par jour, je pouvais également choisir mes horaires. Sa seule intolérance, non négociable : point de fumeur. Attention également aux déchets et à la nature. Il est fier de dire qu'il vit avec le minimum.

Caijiagou
Depuis le champ de riz devant la maison
Il y a environ cinq ans, Yang a quitté Chongqing (après Dali et Lijiang), pour s'installer à Caijiagou. Il voulait un endroit calme et sain pour s'occuper de sa mère, atteinte d'un cancer. Deux ans plus tard, elle décéda. Après une vie passée à barouder, il décida néanmoins de rester et loua cette ferme à l'un des trois frères des deux autres fermes voisines. Une loi interdit apparemment aux citadins de posséder une maison à la campagne, ce qui l'avait contraint à louer simultanément deux maisons. Commença alors l'appel aux volontaires, de l'autre côté de la barrière pour lui.

Compost
Compost
Beaucoup de projets, notamment la création d'une ruche ou d'un poulailler, mais son attention est pour l'instant focalisée sur la rénovation de la maison. Un terrain, assez modeste, mais suffisamment grand pour cultiver salade et riz, délimite cette ancienne ferme. Il n'a pas l'ambition irréaliste d'être auto-suffisant (je l'ai tellement entendu celle là), mais vit sur ses économies en attendant de trouver une solution.

Caijiagou
Un peu plus haut a Caijiagou
La vie ici est tranquille. La centaine de villageois se connaissent tous. La majorité vivent de l'agriculture, et certains de l'élevage de poules, de porcs ou encore d'abeilles. Mon arrivée avait provoqué certaines réactions enjouées chez les enfants. Je n'avais néanmoins pas besoin de demander mon chemin. Dès le "Nihao", ils m'indiquaient systématiquement la direction d'une manière flegmatique, assis ou appuyés sur leurs outils. Placides est l'adjectif qui déterminerait le mieux ces villageois, pour la plupart âgés, les plus jeunes ayant quitté Caijiagou pour les villes.

Yang House
Maison de Yang depuis le chemin
Sans la maison du vieil homme âgé de 90 ans, la maison de Yang serait la plus haute du village. Le dessin est superbe. Sa localisation en plein centre de la vallée en fait un tableau d'une esthétique rare. Les falaises des Golden Buddha Mountain et leurs immenses forêts aux multiples teintes de vert s'étendent magnifiquement autour de ces petites fermes familiales.
Une route blanche toute neuve fait le tour du village en trente minutes à pieds, sur laquelle sont dispersées des ruches, des porcheries et quelques tombes décorées de copeaux de pétards. On entendait régulièrement des explosions en honneur aux morts.

Caijiagou road
Une route faisant le tour du village
Yang est assez curieux, mais préfère parler de lui ou de sa région. J'ai appris qu'il était possible de faire du stop en avion. Il rit des choses simples, mais l'humour (à l'occidental) n'est pas son point fort. Moi, je le faisait souvent marcher, dans tous les sens du terme. Après le dîner, je sortais faire un tour du village, et lui demandais s'il voulait m'accompagner. Généralement, ça ne durait pas plus de vingt minutes, car il s'épuise très rapidement. Le premier soir, il montait la pente en arrière (c'est bon pour son dos) et s'arrêtait toutes les cinq minutes pour reprendre son souffle. Une fois rentré, je me marrais bien en l'écoutant faire ses leçons de français sur sa tablette.
Photophobique qu'il était, je n'ai pas eu l'autorisation de l'immortaliser. Voici donc son portrait robot.

          Yang tintin
          Yang avec des cheveux
Je ne partage pas les idées de Hergé (ai-je besoin de le préciser), mais Yang est assez ressemblant pour le coup. Je redoute le jour où m'accueillera un hôte africain dans le même genre.

Fire Yang
Faire un feu, l'étouffer, récupérer le charbon, s'en servir comme fertilisant (c'est vrai qu'on voit pas mal sa tête sur celle-ci)
Autrement, c'est un gars courageux. Il prend un bain froid tous les matins dans une grande bassine à l'extérieur. Un rituel qui s'accompagne d'exercices de respiration, selon les méthodes d'un youtubeur danois. A therme, les défenses immunitaires du corps s'en trouvent renforcées. Sachant que le matin, il fait entre 5° et 10°, c'est couillu. Je l'entendais parfois depuis ma chambre.

Yang House
Vallée depuis la maison
Le temps n'était pas au top cette semaine. Seulement deux jours de soleil, pendant lesquels la température a grimpé d'au moins quinze degrés. Je priais Ra tous les soirs pour qu'il donne la force au soleil de percer les épaisses couches de nuages. La plupart du temps, il n'a pas exaucé mes prières. Les nuages et le ciel gris faisaient chuter la température de manière extrême. Le soir, je devais mettre ma parka pour survivre.

Caijiagou
Journée sans soleil

 

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Commentaires

  • Mom
    • 1. Mom Le 14/03/2018
    Pas de fumeur chez Yang.... C'est bien ça!

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